Morgan Sportès

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Commentaire d’un membre du Club des Testeurs Amazon (en savoir plus) Au départ, je n’étais pas sûre d’avoir envie de le lire... Le fait divers m’avait horrifiée, et j’étais très mal à l’aise quant à l’instrumentalisation politique qui en avait été faite. On aura tout écrit, et n’importe quoi sur cette affaire ! Et puis, dès les premières pages, j’ai accroché. Une écriture simple, un style presque pauvre pour "se mettre au niveau" de cette bande de jeunes acculturés, mais un style d’un dynamisme incroyable. On part dans l’engrenage. Le force du récit réside dans cette brutalité, mettant une lumière crue sur les faits, très documentés, et laissant au lecteur la liberté de jugement. Les protagonistes ne sont pas limités au "gang" : parents, policiers, otage, tout le monde prend vie et forme dans ce non fiction novel. Le roman commence là où l’auteur prête dialogues et sentiments aux protagonistes, mais traduit avec réalisme et évidence la spirale de la violence sauvage, celle qui née de la pauvreté du verbe (s’exprimant alors par le passage à l’acte), de l’absence d’esprit critique, de l’inexistence des limites. "Tout, tout de suite"... rien que le titre est une vraie réflexion... Un roman engagé, critique, un regard lucide sur le monde que nous laissons à nos enfants, et sur nos enfants que nous laissons au monde, véritable autopsie des symptômes d’une société à la dérive, celle qui voit en son sein grandir ce qu’elle ne veut pas voir, qu’elle nomme "barbare" pour mieux nier qu’elle en est la mère nourricière. Si je n’avais qu’une oeuvre à retenir pour cette Rentrée, ce serait celle-là. C’est peu dire qu’elle m’aura marquée... Aidez d’autres clients à trouver les commentaires les plus utiles Avez-vous trouvé ce commentaire utile ? Oui Non Signaler un abus | Permalien Remarque sur ce commentaire Remarque sur ce commentaire

12 internautes sur 15 ont trouvé ce commentaire utile : 4.0 étoiles sur 5 Effroyable !, 20 août 2011 Par Eminian - Voir tous mes commentaires (TESTEURS) (TOP 500 COMMENTATEURS) (VRAI NOM) Ce commentaire fait référence à cette édition : Tout, tout de suite (Broché) Commentaire d’un membre du Club des Testeurs Amazon (en savoir plus) Morgan Sportès né en 1947 à Alger, est un écrivain français. Il a publié dix-huit livres, nombre d’entre eux ont été traduits en de nombreuses langues et ont attiré l’attention de personnalités comme Claude Lévi-Strauss ou Guy Debord avec lequel il se lie d’amitié après la publication de La Dérive des continents en 1984. Il partage actuellement sa vie entre la rédaction de ses livres et de nombreux voyages de recherche. En préambule à son roman Tout, tout de suite qui vient tout juste de paraître, Morgan Sportès nous prévient : « En 2006, un citoyen français musulman d’origine ivoirienne a kidnappé et assassiné, dans des conditions particulièrement atroces, un citoyen français de confession juive. J’appelle le premier Yacef, le second Elie. L’un a 25 ans, l’autre 23. J’ai réélaboré ces faits, à travers mon imaginaire, pour en nourrir une création littéraire, une fiction. » L’auteur est donc très clair, ceci est un roman écrit à partir d’un fait divers réel et si vous ne vous souvenez plus exactement de quelle affaire il s’agit, sachez qu’il s’agit de celle que la presse avait baptisée à l’époque, « le gang des barbares ». Pour écrire ce livre, Morgan Sportès s’est livré à une véritable contre-enquête, épluchant la presse, interrogeant certains témoins, lisant des documents de source policière etc. Tous ces faits sont la base même de ce récit certifié exact, seuls les dialogues sont de la fiction, la sauce littéraire et le liant qui constitue le roman, la fiction. D’où une avalanche de détails qui ne servent à rien dans le récit mais qui rappellent les rapports de police, comme indiquer le numéro d’une cabine de téléphone public ou préciser qu’une boucherie fait aussi volaille, triperie, charcuterie ! Tous les faits et gestes des protagonistes sont intégralement mentionnés, les noms des rues empruntées, les noms des cybercafés et des commerces où ils entrent. Tout est épouvantable dans ce drame car tout est nul. Si le terme « gang des barbares » sonne bien et a fait de beaux titres de presse, il ne correspond pas à la réalité car il n’y a pas de gang. Yacef est un tocard de banlieue avec une grande gueule - mais qui bégaye sous le coup de l’émotion - qui a réussi, grâce à un séjour en prison, à se faire une réputation de petit caïd et se créer une petite cour de plus minables que lui. A peine libéré, « c’est à la société qu’il déclare la guerre. Il veut du fric, vite. » Les barres HLM, les caves et les halls d’immeubles investis pour des trafics en tous genres, les jeunes en sweat-shirts à capuche, le chômage, l’immigration, l’échec scolaire, l’exclusion sociale etc. tel est le décor sordide et connu de cette histoire horrible. La bêtise crasse de Yacef laisse pantois et effraie car elle défie les raisonnements logiques. Si la brute enlève Elie, la victime est choisie au hasard, c’est tout simplement parce que juif, il est sensé avoir de l’argent et qu’une rançon pourra être demandée. Sauf que Elie n’est pas d’une famille fortunée. Le montant de cette rançon fluctuera à la baisse au fil des trois semaines que durera cet enlèvement. Le roman fait plus de 370 pages, mais il se lit à une vitesse hallucinante car le style est sec fait de phrases courtes alignant les faits les uns après les autres, froidement. On connaît la fin puisqu’elle est connue, pourtant on ne peut se retenir de dévorer l’ouvrage pour en venir à bout et être bien certain que Yacef va se faire coffrer. Un thriller sans suspense final mais tout aussi prenant. Morgan Sportès ne donne jamais son avis, seules quelques phrases nous interrogent, la tactique policière pour retrouver Elie était-elle la bonne, demande le père de la victime tout en rendant hommage aux membres de la Crim’ qui ont « travaillé comme des fous », ce « monstre » comme d’autres du même tonneau n’arrive pas de Mars, il est issu de notre société, qu’elles sont les raisons et les causes d’une telle furie ? La question n’est pas nouvelle, des réponses ’ incomplètes peut-être - ont été fournies mais que faisons-nous pour que cela change ? Un livre coup de poing, à lire bien évidemment.

« Honnête voyou, Krack, alias Grand Black, ne songe qu’à gagner malhonnêtement son pain. Yacef, « qui mélange tout », foi, politique, finance, participe, comme le dit la formule célèbre, de ce « socialisme des imbéciles : l’antisémitisme ». Le « Juif » incarnant à ses yeux le Capital, devient symbole du monde qui l’oppresse. C’est qu’il n’a pas les instruments intellectuels qui lui permettraient de comprendre ce qui, dans le monde spectaculaire qui est le nôtre, l’opprime en effet. » Aidez d’autres clients à trouver les commentaires les plus utiles Avez-vous trouvé ce commentaire utile ? Oui Non Signaler un abus | Permalien Remarque sur ce commentaire Remarque sur ce commentaire

5.0 étoiles sur 5 Passionant roman à la croisée du polar et de l’étude ethnographique, 7 septembre 2011 Par Pierre-yves Champenois (Lyon, France) - Voir tous mes commentaires (TOP 500 COMMENTATEURS) (TESTEURS) (VRAI NOM) Ce commentaire fait référence à cette édition : Tout, tout de suite (Broché) Commentaire d’un membre du Club des Testeurs Amazon (en savoir plus) Morgan Sportès revient sur l’affaire qui avait secoué la société française au début de l’année 2006 lorsqu’avait été retrouvé le corps du jeune Ilan Halimi dans une forêt de l’Essonne. Après une chasse à l’homme, le "cerveau" de l’affaire et ses complices avaient été arrêtés et le cirque médiatique s’était mis en branle qualifiant cette bande de "Gang des barbares", avec tout l’imaginaire auquel cela pouvait renvoyer.

A l’époque, une fois la tragique et horrible histoire retracée rapidement, la comparaison avec le roman (adapté au cinéma par Bertrand Tavernier en 1995) de Morgan Sportès "L’Appât" avait rapidement germé dans l’esprit de ceux qui avaient lu ou vu cette oeuvre. Outre son amour immodéré pour les faits divers, voilà peut-être une des raisons principales qui ont poussé l’auteur à s’intéresser à cette sordide histoire, malheureusement bien réelle.

Le résultat est assez époustouflant. Morgan Sportès parvient en effet à mélanger l’enquête policière, avec le traitement médiatique de l’affaire, en éclairant l’ensemble d’un jour puissamment nouveau où le lecteur se rend compte, page après page, que l’image de tueurs sanguinaires cyniques collés aux membres de ce "gang" n’a que peu de rapport avec la réalité.

Cette même réalité, si terrible, empêche au lecteur d’esquisser le moindre sourire pendant les premières pages et devant les échecs répétés de cette bande ressemblant davantage aux Pieds Nickelés qu’à de grands gangsters. Car la suite, elle, est horrible. Une fois Ilan enlevé (Elie dans le livre), aucun élément ne va s’enchaîner correctement pour personne : pas plus pour le gang que pour les policiers qui comprendront trop tard qu’ils n’avaient pas une bande déterminée et cynique en face d’eux, mais davantage des jeunes paumés qui n’ont pas compris (ou à qui on n’a pas appris) où les limites sociétales se situaient. Avec en point d’orgue cette résignation du cerveau de la bande à libérer son otage (après de multiples sévices issus tout droit de l’imaginaire cinématographique américain), passage où le lecteur, bien que connaissant la réalité, se prend à espérer pour la vie du jeune Elie... avant un dernier retournement de situation, fatal cette fois-ci.

Mais la force du livre ne se situe pas que dans la reconstruction brillante de ces faits tragiques. Là où l’ouvrage est considérable, c’est dans sa capacité à faire réfléchir sur les tenants et les aboutissants de notre société contemporaine, et pas seulement sur la question de l’antisémitisme au sens strict. Car si l’acte initial (le kidnapping) possède effectivement un caractère antisémite, on se rend vite compte que la réalité est plus complexe : c’est bien à cause de leur inculture, de leur refus de leur statut de citoyen et du sentiment de laissés-pour-compte face à la société qui avancent sans eux que ce crime a pu voir le jour dans leur esprit. C’est ici que le livre fait peur : si de simples paumés sont capables du pire, on ne peut qu’imaginer avec effroi la manière dont la société civile va évoluer dans les prochaines années.

Sans apporter de réponse à cela, sans diminuer l’horreur des actes commis à l’encontre du jeune Ilan, Morgan Sportès parvient à produire un ouvrage considérable eu égard à l’éclairage qu’il apporte sur l’ensemble de la société où se mélangent pêle-mêle emballement médiatique, récupération politique, conflit israélo-arabe, problèmes des cités, antisémitisme, désoeuvrement des jeunes, jeux dangereux de la séduction, bref, autant de thèmes qui revêtent une importance majeure dans cette histoire survenue en 2006, et qui ne sont toujours pas en passe d’être réglés en 2011